Manuel de dramaturgie à l'usage des assassins

Jérôme Fansten

Anne Carrière

  • Conseillé par
    16 mars 2015

    suspens

    Non, le narrateur n’est pas schizophrène ; oui, il a bien un frère jumeau et ne sort de la cave qu’un jour sur deux.

    On devine, au fil des pages, que la mère n’avait pas toute sa tête. Du coup, la vengeance tourne court. Qui plus est, le narrateur tombe amoureux, ce qui complique les relations avec son frère. Sans oublier le Turc qui leur fournit la drogue qu’ils revendent afin d’avoir un revenu.

    Et puis l’entité est scénariste pour le cinéma. Mais sa passion, ce sont les explosifs. Chaque fois que la situation devient un peu tendue, il cherche comment faire exploser la maison accidentellement.

    Vous l’aurez compris, des personnages bien barrés et une narration qui procède par tics (etc…. entre autre).

    On croise du beau monde dans ces pages : Anne Carrière elle-même, ainsi que Maud Mayeras (excusez du peu), entre autre.

    Mais la question subsiste en fermant ce livre : quelle est la part de vérité dans ce récit ?

    L’image que je retiendrai :

    La citation de David Lynch répétée plusieurs fois « Je ne vois pas pourquoi les gens attendent d’un oeuvre d’art qu’elle veuille dire quelque chose alors qu’ils acceptent que leur vie à eux ne rime à rien« .

    https://alexmotamots.wordpress.com/2015/03/14/manuel-de-dramaturgie-a-lusage-des-assassins-jerome-fansten


  • Conseillé par
    1 mars 2015

    Coup de coeur

    Remarque préalable à mon article : Jérôme Fansten est un fou dangereux ! Le vrai Jérôme Fansten, l'écrivain, pas son double -pour le coup le mot est à prendre dans les deux sens puisqu'ils sont deux- de papier. Seconde remarque : les doubles sont barrés eux-aussi. J. Fansten, le vrai, il prend son nom, ses professions, sans doute certains de ses traits de caractère et se met donc en scène dans un rôle d'entité : "Non, je ne suis pas schizo. Nous sommes vraiment deux..." Et puis tant qu'il y est, il ajoute d'autres vraies personnes auxquelles il prête des propos et des actes dont elles sont sans doute incapables sauf dans la fiction. Il insère également dans son bouquin des mails, des conversations sur Internet entre L. et lui, des extraits des notes de l'entité et même une photo. Un bouquin absolument original sur la forme, qui l'est pareillement sur le fond. Ce pourrait être un énième polar sur une vengeance et l'on se trouve dans un roman difficile à classer. Noir, sûr ! Jérôme Fansten joue avec les notions de réalité et de fiction brillamment.

    Lorsqu'en tant qu'entité, il décide -sur les conseils de son éditeur Stephen Carrière- d'écrire un Manuel de dramaturgie, il prend des notes, fait des recherches, et c'est à la fois ce Manuel, le compte-rendu des assassinats et leur préparation, les relations mère/fils et frère/frère, la naissance et l'évolution de la relation amoureuse avec L, les démêlées avec le grossiste de drogue et les craintes que la police ne les découvre, c'est donc tout cela que l'on découvre dans ce livre. Bien que copieux, il n'est jamais ennuyeux ni confus. Totalement maîtrisé, les révélations ou rebondissements arrivent parfois juste au détour d'une phrase. Des explications comme cette manie de décrire les tenues vestimentaires des invités des sauteries parisiennes que l'entité-dealer fréquente avec les noms des marques -d'aucuns y verront même un agaçant name-dropping qu'ils vénèrent sans doute chez d'autres, comme Brett Easton Ellis- arrivent plus tard. Enfin, bref, je me suis régalé de bout en bout.

    C'est un roman noir social, totalement ancré dans l'époque, qui parle du monde du cinéma, de celui de la littérature -sans doute avec outrance ?-, Jérôme Fansten n'est pas avare de petites vacheries -sans citer de noms- sur certains types d'acteurs ou d'écrivains putassiers (mot qui revient plusieurs fois) qui, pour réussir sont prêts à toutes les compromissions même -et surtout ?- lorsqu'elles concernent leur travail. J. Fansten se balade également dans ses ouvrages précédents -qu'il n'est pas obligatoire d'avoir lus, la preuve je n'ai pas lus ceux dont il parle moi-même-, n'hésitant pas à épingler quelques critiques un peu courtes, peu aimables et pas vraiment argumentées.

    Je classe sans hésiter Manuel de dramaturgie à l'usage des assassins dans ma catégorie Coups de cœur, comme je l'avais fait avec l'autre roman de Jérôme Fansten que j'ai lu, L'amour viendra, petite !

    Le titre me rappelle un bouquin qui, sur le fond n'a rien à voir, de P. Desproges, Manuel de savoir-vivre à l'usage des rustres et des malpolis ; dans certaines pages du Manuel de J. Fansten, j'ai retrouvé des accents desprogiens : humour vache et noir, un brin désespéré, amour des belles lettres et plaisir de jouer avec les mots et les niveaux de langage. Lorsque je cite Desproges, comme référence, comprenez que pour moi, on est dans le haut du panier...

    N'hésitez pas !